lundi 5 mai 2008


Au-delà de l'urgence, investir pour l'alimentation
L'accès à la nourriture étant aujourd'hui un défi planétaire, les progrès agricoles doivent être désormais envisagés et développés à cette échelle
La crise alimentaire actuelle choque et remet en place les échelles collectives de priorités. Elle nécessite pour aujourd'hui des actions de solidarité internationale d'urgence, mais aussi pour demain de relever le défi d'une alimentation durable. Cette crise pose le problème immédiat d'un accès à la nourriture pour les plus pauvres alors qu'il n'y a pas de déficit global de quantité. Mais, en 2050, l'offre alimentaire pourrait être insuffisante si nous ne disposions pas d'une capacité de production agricole pour nourrir 9 milliards de femmes et d'hommes.
Les projections de l'INRA pour 2020 montrent que l'agriculture mondiale peut satisfaire cette demande alimentaire, mais aussi des besoins énergétiques raisonnés, avec une augmentation des rendements du même ordre de grandeur que celle des vingt dernières années dans le monde et une augmentation des surfaces cultivées de 5 % à 10 %. C'est à notre portée à trois conditions : poursuivre et relancer l'investissement matériel et intellectuel dans ce secteur sur tous les continents, pousser aux pratiques écologiquement soutenables par des incitations, diffuser les innovations et les expériences acquises.
DISSUADER LES SPÉCULATIONS
En 2050, l'agriculture sera d'un nouveau genre, intensive d'une autre façon : riche en savoirs et savoir-faire biologiques, techniques et économiques ; adaptée aux potentialités de chaque milieu ; mobilisant les pratiques des acteurs locaux. Elle sera donc plurielle, et c'est une palette de solutions que la recherche agronomique doit préparer. Toutes les disciplines doivent être sollicitées, biologie moléculaire comme écologie, à toutes les échelles, du gène à la plante, de la plante aux territoires. Mais cette mobilisation, ces investissements nécessitent de dissuader les spéculations financières sur l'alimentation, de prévenir les dommages sanitaires, d'assurer la protection en cas d'effets destructeurs liés aux changements climatiques, d'encourager la gestion des ressources naturelles. Cela relève des politiques publiques de stabilisation et de régulation.
L'agriculture française a su relever en son temps le défi de la satisfaction des besoins alimentaires de nos concitoyens. La recherche agronomique de notre pays a ici joué un rôle premier. Les défis alimentaires, environnementaux et sociaux sont aujourd'hui planétaires ; les progrès agricoles doivent être désormais déployés à cette échelle et l'ensemble de la recherche agronomique internationale doit se mettre au service de cet objectif. C'est le sens du récent travail accompli par soixante pays autour du renouveau de l'agronomie pour les objectifs du millénaire.
Marion Guillou
Présidente de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Manu : du local ça nous intéresse on veut te voir plus et te lire très souvent...