Je ne vous ai pas donné de nouvelles de Sioule-Biogaz
depuis longtemps mais en voici et plutôt bonnes.
Si je me suis abstenu aussi longtemps c’est que
contrairement à tout ce qu’on pourrait penser les énergies renouvelables
dérangent beaucoup de monde et si nous avons réussi à faire fonctionner notre
unité et non sans mal, c’est après s’être battu contre vents et marées.
Nous avons perdu notre procès contre l’assurance de
Méthajade (MMA) pour l’explosion de la cuve pour deux raisons essentielles, la
première est que bien que nous ayons payé un contrat d’assurance Tous Risques
Chantier et Tous Risques Montages et Essais à Méthajade, son patron Frédéric
Delesquen a bien empoché la prime mais ne s’est jamais réassuré derrière donc
pas assuré, nous avons essayé de faire marcher la responsabilité civile de
Méthajade, mais comme celle-ci a déposé le bilan cette assurance ne pouvait pas
marcher.
La deuxième raison est que l’expertise qui a été
diligentée par le tribunal a un rendu très médiocre. L’expertise faite par Emmanuel Adler de la société
Aconsult a été d’une légèreté remarquable sur le sujet. Un rapport en l’état de
12 pages dont seulement 4 pour répondre au tribunal sur un sujet aussi
complexe, sans aucune mention ni description des organes de sécurité, sans même la fiche technique du constructeur des cuves, nous demandant en plus des 4000€ alloués, 6000€ supplémentaires pour
s’adjoindre un sapiteur financier alors que ce travail fait partie de sa
mission de base désignée par l’ordonnance du tribunal et que nous n'avons évidemment pas donné suite à cette demande.
Pour sa plaidoirie, la partie adverse à court d’argument n’a rien trouvé de mieux que de reprendre des passages entiers des articles sur mon blog et de se demander si l’accident n’était pas intentionnel d’où ce silence depuis des mois.
Il est évident que sur la base d’un rapport sans intérêt,
sans conclusion, sans chiffrage financier le tribunal ne pouvait que nous
débouter.
Après avoir trouvé un accord de sortie avec Air-Liquide
nous avons pris contact avec PRODEVAL pour construire un nouveau purificateur
en remplacement qui correspondait davantage à la particularité de la
méthanisation voie discontinue et qui pouvait inclure notre brevet de
récupération du CO2 pour l’inertage des garages, étapes essentielles dans le
fonctionnement de ce type de méthanisation pour produire du biométhane.
Durant la phase d’élaboration technique du nouveau
purificateur et sa construction, nous avons tout réhabilité la partie
méthanisation. Nous avons redimensionné la partie aspersion du percolât avec du
matériel d’irrigation surdimensionné, revu la partie air, compresseur et vannes
pneumatiques et changé les portes qui viennent désormais de Pologne, des portes
très simples, sans joint gonflant. Tout
l’automatisme a été entièrement reconstruit après une analyse fonctionnelle,
avec des fonctions inédites dans la souplesse et la sécurisation de
l’exploitation qui permet des commandes pouvant modifier le fonctionnement en
cours d’exploitation et donc rectifier la production de gaz, assisté par une
instrumentation sur les différents réseaux, tout est quasiment mesurable et
paramétrable. Un grand travail de qualité grâce à la société APIWATT.
Depuis janvier PRODEVAL a installé le purificateur, le 22
février l’injection commerciale commençait en constante progression pour
arriver à des pics de production dépassant les calculs théoriques à plus de
700Nm3 par jour, même si celle-ci reste fluctuante à un niveau plutôt élevé
permettant d’assurer désormais la rentabilité de l’installation.
Nous avons sorti beaucoup de résultats et de conclusions
sur l’exploitation de la méthanisation et le paramétrage du purificateur en
collaboration avec les équipes de PRODEVAL très à l’écoute avec des techniciens
très compétents et réactifs et avons vraiment un purificateur paramétré à notre
main, performant qui suit la production de biogaz. L’air et donc l’azote, est
toujours l’ennemi de la qualité, il faut absolument aucune entrée d’air, ce qui
peut être acceptable en cogénération mais impossible en production de
biométhane. Une défaillance d’un simple joint peut faire monter le taux d’azote
à 3% ou plus et rendre impropre à la commercialisation le biométhane, et comme
tout fonctionne en dépression l’étanchéité est la clé de tout d’où l’importance
de notre système d’injection de CO2 qui outre les fonctions d’inertage maintien
la pression en cas de chute trop forte. Les
meilleures productions de biogaz sont lorsque les garages sont en dépression
donc leur étancheité est primordiale ou modifiable. Nous avons mesuré que des
garages en pression pouvaient produire de 20 à 30% de moins que des garages en
dépression, c’est normal la pression et la saturation en biogaz inhibe la
production de gaz, alors que la dépression la favorise.
L’inertage au CO2 dès la fermeture des portes après
remplissage chasse l’air et permet une atmosphère anaérobie immédiate.
Au passage notre inertage au CO2 en phase finale de vie
des garages est très sécurisant et c’est une folie de chasser le biogaz avec un
fort pourcentage de méthane avant ouverture avec de l’air, le pouvoir explosif
est alors très fort, 5 à 15% de méthane avec de l’air possède un pouvoir
explosif, il y aura un jour un accident
par une simple étincelle d’un ventilateur, de l’électricité statique dans l’air
ou autres pouvoirs d’explosion.
En revanche le poste d’injection de GRDF est toujours la
galère et très, trop souvent nous ne pouvons injecter à cause de la défaillance
de cet équipement que nous louons par obligation fort cher. Dans la première
période de production avant le changement de purificateur, nous avions eu des
problèmes de compteur, d’odorisation, de mesure et d’analyses, heureusement
nous pouvions avoir accès au poste et avons résolu bien des problèmes nous-mêmes.
Mais désormais l’entrée est interdite ce qui fait qu’en cas de panne de courant
par exemple il faut faire venir un technicien de Clermont (70km) pour appuyer
sur un bouton et c’est nous qui lui disons lequel. Mais nous avons toujours des
problèmes avec le chromatographe qui analyse le gaz et on nous avait dit qu’il
n’y avait pas plus précis et fiable et nous voyons surtout qu’il n’y a pas plus
capricieux, peu fiable tant dans son fonctionnement que dans ses analyses. Nous
avons 3 séries d’analyseurs en ligne en amont qui disent tous pareil et bien le
chromatographe lui, en donne une différente et bien sûr si elle n’est pas bonne
ferme la vanne. Cet appareil est sensible au chaud, au froid, aux vibrations,
nous en sommes au deuxième remplacement total et au moins à la quatrième carte
électronique. L’odorisation fonctionne quand elle y pense et régulièrement il
faut changer une pompe ou régler le dosage. Et bien entendu les pannes sont
souvent le vendredi ce qui fait des réparations le lundi ou le mardi suivant
car les réparations c’est bien sûr en jours ouvrables.
Et puis toujours ce combat avec GRDF sur le manque de
souplesse des normes d’injection. Leur raisonnement est entièrement basé sur le
gaz fossile sans tenir compte que la méthanisation est une activité vivante et
donc aléatoire tant sur la quantité que sur la qualité. Dès que le gaz descend
en dessous d’un dixième de la norme la vanne d’injection se ferme. Cela oblige
donc à mettre une purification démesurée et donc très couteuse alors qu’une simple
souplesse ferait baisser le coût de l’ensemble de 20 à 30% et pourrait
multiplier les projets surtout agricoles. Mais la politique de GRDF c’est des
gros projets très couteux afin de respecter la norme ! la norme c’est pire
que les écritures saintes, même si à côté de cela 98% du gaz consommé en France
est importé et qui ne respecte pas cette norme. Je reste persuadé que les
petits projets agricoles sont possibles et rentables si on assouplit les normes
et qu’on tient compte du pouvoir de dilution dans le réseau.
On nous oblige à respecter toutes les normes pour une
production de 30Nm3/h injectée alors qu’à 200 mètres de nous une usine en
consomme 2000Nm3/h ! C’est complètement fou et ubuesque.
Mais en respectant la norme tout le monde est couvert même
si ça ne sert à rien, GRDF, la DREAL, la CRE, tous ces gens dans les bureaux ne
prennent aucun risque alors que nous faisons tourner l’unité 24h/24, 7j/7 et
que nous avons investi 1,7M€.
Au passage le Crédit-Agricole Centre-France a toujours
été un partenaire fiable dans nos malheurs, patient sur les remboursements, à
notre écoute et même de bons conseils.
En conclusion nous sommes arrivés à faire fonctionner la
seule et unique unité de méthanisation en voie discontinue en France pour de
l’injection de biométhane de manière rentable en accumulant une expertise et
une somme de renseignements sur le fonctionnement de la méthanisation et de la
purification avec la collaboration efficace de gens compétents, à notre écoute
et capables de transposer techniquement notre vision du fonctionnement. Il
reste beaucoup encore à apprendre notamment sur le fonctionnement biologique de
la méthanisation, nous continuons l’expérimentation pour améliorer notre niveau
de production, des améliorations sur la partie technique seraient à apporter,
mais le manque de financement nous limite et nous verrons dans le temps celles
qui seront possibles.