Ainsi donc la justice a été rendue dans l’affaire de la
manifestation du 30 septembre 2013 contre les locaux de l’ONEMA où j’étais
impliqué en tant que président de la FNSEA03 avec deux autres agriculteurs.
Nous savions que depuis des semaines l’Etat donne comme
consigne de sanctionner les manifestations syndicales, surtout celles
agricoles, à contrario il amnistie les leaders syndicaux ouvriers dans les
dégradations des établissements publics. Le tribunal a suivi partiellement les
réquisitions du procureur et bien plus que les sommes financières en jeu, c’est
le principe et la justification des peines qui sont surprenantes.
Ainsi le tribunal alloue 700€ de dommages et intérêts à l’ONEMA
au motif que la manifestation n’était pas déclarée ! Ainsi par
jurisprudence chaque citoyen pris dans une manifestation pourra désormais, en s’assurant
que la manifestation n’a pas été déclarée, demander aux organisateurs des
dommages et intérêts aux organisateurs. C’est un vrai job à développer, faire
les manifestations, se plaindre au tribunal et recevoir 700€ par plainte. Vu le
nombre de manifestations en France ça peut rapporter gros et c’est plus sûr que
le loto.
En effet hormis cette bizarrerie juridique au profit de l’ONEMA,
le reste des sanctions sont des amendes dont les juges guidés par leur
conscience ont prononcé leur verdict dans le but de marquer le coup, poussés par
le pouvoir en place et surtout de fortes pressions de la CGT de l’ONEMA depuis
le début de l’affaire qui n’est pas avare en tracts, courriers de plainte
envers l’employeur de ses agents.
C’est donc bien encore une fois l’ONEMA qui se trouve au cœur
de tout cela ne supportant pas qu’on puisse remettre en cause leur manière de
faire dans leur travail quotidien axé essentiellement sur la répression et
particulièrement des agriculteurs. J’en veux pour preuve que nombres d’assainissements
autonomes non-conformes voir sauvages aux yeux de tous qui ne sont jamais
inquiétés, il y a la police de l’eau des agriculteurs très ferme et la police
de l’eau du reste de la population beaucoup plus laxiste.
Nous avons d’ailleurs avant et après le 30 septembre 2013
demandé à plusieurs reprises de rencontrer les responsables locaux de l’ONEMA
ainsi que les procureurs directement au-dessus des agents de cette organisation
et nous attendons toujours… Preuve que le dialogue est bien fermé de ce côté-là.
La seule fois où nous avons rencontré un directeur de l’ONEMA, ses seules
paroles ont été de nous dire qu’il n’avait aucun pouvoir sur ses agents. Voilà
donc en république un Etat dans l’Etat.
Signalons aussi qu’à l’occasion de ce procès le procureur
de la république a demandé lors de l’instruction par deux fois au Préfet si il
avait reçu une déclaration de manifestation en toute méconnaissance du fait qu’en
zone gendarmerie, comme à St Pourçain, c’est à la mairie que doit se faire cette
formalité. Le juge n’a pas donc pu
savoir si la déclaration a été faite ou non puisque jamais le maire de St
Pourçain n’en a reçu la demande de la part du procureur. Cela n’a aucunement empêché
le juge de me condamner pour ce motif au profit de l’ONEMA, ce qui prouve bien
la volonté d’une sanction au profit de l’ONEMA, défendu au passage par un
avocat parisien lors du procès dont la plaidoirie a duré à peine 5 minutes s’embrouillant
dans les termes agricoles et ne sachant même pas la signification du sigle
ONEMA à la différence de notre avocat Maître Gard dont la plaidoirie de près d’une
heure a été étayée d’arguments construits.
Dans les fautes de forme on notera aussi que le procureur
a porté son argumentation en confondant le type de véhicule sali parlant d’un
Berlingo Citröen à la place d’une Mégane.
Ainsi donc malgré toutes ces erreurs dans l’instruction
de l’affaire nous avons été condamnés, pour avoir versé un seau de mélasse sur
une voiture, déchargé une remorque de fumier sur la voie publique dont le maire
de la ville n’a pas porté plainte et a même refusé de le faire enlever en
soutien, et ne pas avoir fait la déclaration de manifestation que personne n’a
jusqu’alors prouvé.
Que penser des petits voyous des banlieues relaxés après s’en être pris à des agents de la force publique, c’est la justice des villes
et celle des campagnes, je passe aussi sur les violences faites à la force
publique à l’occasion des manifestations contre le barrage de Sivens ou de
Notre Dame des Landes qui ne seront jamais poursuivies.
Par contre ce procès a été un formidable élan de soutien
et de fédération du monde rural autour de notre action. J’ai reçu et je reçois
encore beaucoup de messages dans ce sens par nombre d’agriculteurs, de leaders
syndicaux d’autres syndicats et de nombreux maires et élus locaux dont beaucoup
étaient même présents au procès. Je
ressens clairement une exaspération du monde rural à l’empilement des contraintes
et normes sur les activités en monde rural.
Une frontière est clairement en train de se créer entre
ceux qui font et appliquent la loi et ceux qui la subissent.
Ce procès aura pour effet de ne pas apaiser les choses
voir même de les exacerber, et sans un dialogue que j’appelle encore une fois
de mes vœux, la tension ne pourra pas redescendre dans les campagnes sur les
contrôles sans mettre en avant la pédagogie et la prévention par ceux qui
connaissent et sont chargés de faire appliquer la loi. Nous avons alerté les
pouvoirs publics nous attendons donc maintenant des réponses à nos demandes
sans illusion.