vendredi 8 août 2025

Les agriculteurs, ces koulaks modernes

 


Quand l’actualité s’entrechoque et ressert les plats de l’histoire contemporaine.

Qui a entendu parler des koulaks ? Certainement pas les deux millions de signataires de la pétition contre la loi Duplomb, dont la culture générale s’arrête à TikTok ou Instagram, seules sources de leur apprentissage historique, auxquelles ils font toute confiance pour avaler les influences et les fausses idées servant l’idéologie décroissante.

Les koulaks, ces paysans russes exterminés après la révolution de 1917, avaient pour la plupart le « défaut » d’être propriétaires d’une ou quelques vaches, d’un peu de basse-cour et de quelques lopins de terre, dont ils tiraient, au prix d’heures infinies de labeur, quelques revenus et l’avantage de nourrir le reste de la population. En résumé : d’affreux capitalistes.

Ainsi, au nom du socialisme et de la collectivisation, ils furent expropriés et, pour les plus réticents, tués avec leur famille. Ils devinrent les boucs émissaires d’une société pauvre qui voyait en eux une honteuse richesse. Ceux qui avaient fui les campagnes pour grossir les villes formèrent une classe prolétaire nourrissant une jalousie qui mena à la révolution.

Politiquement, et bien que le vote ne soit pas une pratique courante à l’époque, les koulaks étaient plutôt des gens fidèles à la religion chrétienne et qui auraient pu voter à droite.

Entre 1928 et 1937, l’URSS procéda à la « dékoulakisation » afin de construire d’immenses kolkhozes collectifs. Il s’ensuivit des famines à répétition, dont la plus violente en 1932, particulièrement en Ukraine, qui reste le grenier à blé de l’Europe.

Les historiens ont bien documenté toute la puissance néfaste d’une politique dogmatique, déconnectée de la réalité économique.

L’agriculture française est en train de subir les mêmes effets, pour les mêmes raisons. La  battaille contre la loi Duplomb et tout ce qui l’entoure sont un excellent révélateur d’une idéologie décroissante qui s’acharne sur une profession — une population — ayant encore une fois le désavantage de posséder du capital et de voter majoritairement à droite, comme l’attestent les récentes élections professionnelles.

Le problème est très loin d’être agricole, scientifique ou environnemental. Les forces de gauche radicale se moquent éperdument de ces aspects. Ce qui compte à leurs yeux, c’est la destruction de notre société, car, selon elles, l’homme est néfaste à la planète et doit disparaître. Semer le chaos en prenant fait et cause pour l’islamisme en est un moyen ; exploiter le marché de la peur et taper sur les agriculteurs, très minoritaires et votant à droite, surtout avec le ventre plein, est une tâche facile.

Pourtant, cette agriculture n’a cessé d’accompagner l’augmentation de la population en la nourrissant toujours mieux, tout en lui permettant d’allonger sa durée de vie. Tout ce qu’on ne pourra plus produire en France, au fur et à mesure de la restriction des moyens techniques, sera toujours produit ailleurs, par des agriculteurs du bout du monde. Ni l’environnement ni notre santé n’en sortiront gagnants.

Pire encore : tous les produits interdits petit à petit aux agriculteurs professionnels formés restent en vente libre pour les particuliers. C’est là la caricature d’un acharnement : supprimer des outils aux professionnels agricoles tout en gardant le bénéfice de leur efficacité pour le confort personnel, surtout en ville. C’est exactement comme si l’on interdisait l’utilisation du clavier d’un ordinateur pour des raisons professionnelles, en faisant peur sur sa nocivité pour la santé, tout en permettant son usage à titre personnel pour surfer sur les réseaux sociaux.

Petit à petit, les agriculteurs disparaissent, surtout dans les zones difficiles à exploiter. Ainsi, dans les régions défavorisées, l’agriculture recule, l’activité de production disparaît, les cultures gourmandes en temps et en peine sont supprimées, le pastoralisme est abandonné au profit du loup — totem environnemental —, les désherbants sont interdits, et des « réserves naturelles » sont créées. En réalité, ce sont des sanctuaires où la faune animale est prioritaire sur l’activité humaine.

Il en résulte ce que l’on vient de voir dans l’Aude : des incendies gigantesques, incontrôlables, favorisés par la végétation sèche prête à s’embraser à la moindre étincelle, aggravés par le dérèglement climatique. S’ensuivront inondations et coulées de boue, faute de cultures ou de nature entretenue pour retenir les pluies.

L’extrême gauche, toujours prompte à se saisir de toute cause pour faire peur, utilisera alors le prétexte du dérèglement climatique pour expliquer aussi bien les incendies que les inondations, en prônant encore moins d’activité humaine, jusqu’à prouver, par un malthusianisme exacerbé, que l’homme doit disparaître. Elle tempêtera également contre les fermetures d’usines, conséquences de la destruction des filières agricoles, sans voir le rapport de cause à effet. La stratégie reste identique : faire peur et dénoncer toujours, en accusant l’homme et son système d’exploiter les ressources naturelles.

Les agriculteurs sont les koulaks d’aujourd’hui. Les méthodes d’extermination sont moins brutales : on ne les tue pas, on ne les enferme pas, mais on les laisse dépérir à petit feu, se suicider, on leur retire leurs moyens de production, et donc leurs revenus. Ils sont devenus les boucs émissaires d’une société qui masque ses contradictions et sa schizophrénie derrière la stigmatisation d’une minorité laborieuse.

Lors de la prochaine famine — qui viendra inévitablement —, on se souviendra qu’avant les écologistes au ventre plein, il y avait des agriculteurs, des koulaks… et que tous mangeaient à leur faim.