Le déclin massif des abeilles est en voie d'élucidation
Les effets délétères de l'association entre pesticides et un parasite commun ont été démontrés
Depuis un peu plus d'une dizaine d'années, des mortalités massives d'abeilles domestiques sont relevées un peu partout dans le monde - principalement aux Etats-Unis et en Europe. Un constat d'autant plus inquiétant qu'environ un tiers de la nourriture consommée à l'échelle mondiale repose sur la pollinisation des cultures, dont les abeilles sont le principal agent. Les raisons de la raréfaction d'Apis mellifera sont très débattues.
Parasites naturels ou exposition aux insecticides agricoles ? Selon des travaux publiés dans la dernière édition de la revue PLoS One, c'est une synergie entre ces deux facteurs qui est sans doute à l'origine du déclin de l'insecte social. L'étude, qui démontre en laboratoire l'effet délétère sur les abeilles de deux molécules insecticides d'usage courant, devrait relancer la polémique consécutive à la remise sur le marché, mi-juin, du pesticide Cruiser, commercialisé par Syngenta.
Ce n'est cependant pas au principe actif du Cruiser - le thiamétoxam - que se sont intéressés les chercheurs, mais à deux molécules de deux familles très distinctes : le fipronil et le thiaclopride (proche du thiamétoxam). La première est le principe actif du Régent de BASF, suspendu en France depuis 2004 ; la seconde est commercialisée par Bayer sous l'appellation Calypso.
" Effet cocktail "
En exposant une dizaine de jours des abeilles saines à des doses très faibles de chaque produit, les chercheurs ne notent pas de mortalité importante. Mais, en réitérant l'expérience sur des insectes préalablement infectés par Nosema ceranae, un parasite intestinal très courant, les auteurs relèvent des mortalités d'environ 70 % à 80 %, pour l'une et l'autre molécules.
" A elle seule, l'infection par Nosema ceranae ne provoque que des mortalités limitées, explique Frédéric Delbac, enseignant-chercheur au Laboratoire micro-organismes, génomes et environnement (université Blaise-Pascal à Clermont-Ferrand, CNRS) et coauteur de l'étude. De même les niveaux d'exposition auxquels nous avons soumis les abeilles étaient très faibles, de l'ordre d'un centième de la dose à partir de laquelle on observe 50 % de mortalité. "
Pour ce qui est du fipronil, les doses appliquées en laboratoire aux insectes sont du même ordre que celles rencontrées dans la nature, voire inférieures, selon Frédéric Delbac.
A de tels niveaux d'exposition, aucune des deux molécules testées n'est donc dangereuse pour l'insecte. Mais chacune entre en synergie avec les effets de Nosemaceranae : c'est ce " cocktail " qui est mortel.
Un tel constat est de mauvais augure pour l'hyménoptère. " Il est plus difficile, pour une espèce, de s'adapter à une pression qui résulte de la conjugaison de deux facteurs très différents que lorsqu'un unique facteur est en cause ", explique M. Delbac. Cet " effet cocktail " démontré en laboratoire n'est pas étonnant : les spécialistes le soupçonnaient de longue date, sans l'avoir quantifié.
Le fait singulier est plutôt que chacune des deux molécules - appartenant pourtant à deux familles chimiques très différentes - provoque des effets comparables lorsqu'elle est associée au parasite. Les auteurs n'ont pour l'heure pas d'explication à ce phénomène, qui pourrait conduire à un réexamen des autorisations des molécules phytosanitaires.
Stéphane Foucart
© Le Monde
Les effets délétères de l'association entre pesticides et un parasite commun ont été démontrés
Depuis un peu plus d'une dizaine d'années, des mortalités massives d'abeilles domestiques sont relevées un peu partout dans le monde - principalement aux Etats-Unis et en Europe. Un constat d'autant plus inquiétant qu'environ un tiers de la nourriture consommée à l'échelle mondiale repose sur la pollinisation des cultures, dont les abeilles sont le principal agent. Les raisons de la raréfaction d'Apis mellifera sont très débattues.
Parasites naturels ou exposition aux insecticides agricoles ? Selon des travaux publiés dans la dernière édition de la revue PLoS One, c'est une synergie entre ces deux facteurs qui est sans doute à l'origine du déclin de l'insecte social. L'étude, qui démontre en laboratoire l'effet délétère sur les abeilles de deux molécules insecticides d'usage courant, devrait relancer la polémique consécutive à la remise sur le marché, mi-juin, du pesticide Cruiser, commercialisé par Syngenta.
Ce n'est cependant pas au principe actif du Cruiser - le thiamétoxam - que se sont intéressés les chercheurs, mais à deux molécules de deux familles très distinctes : le fipronil et le thiaclopride (proche du thiamétoxam). La première est le principe actif du Régent de BASF, suspendu en France depuis 2004 ; la seconde est commercialisée par Bayer sous l'appellation Calypso.
" Effet cocktail "
En exposant une dizaine de jours des abeilles saines à des doses très faibles de chaque produit, les chercheurs ne notent pas de mortalité importante. Mais, en réitérant l'expérience sur des insectes préalablement infectés par Nosema ceranae, un parasite intestinal très courant, les auteurs relèvent des mortalités d'environ 70 % à 80 %, pour l'une et l'autre molécules.
" A elle seule, l'infection par Nosema ceranae ne provoque que des mortalités limitées, explique Frédéric Delbac, enseignant-chercheur au Laboratoire micro-organismes, génomes et environnement (université Blaise-Pascal à Clermont-Ferrand, CNRS) et coauteur de l'étude. De même les niveaux d'exposition auxquels nous avons soumis les abeilles étaient très faibles, de l'ordre d'un centième de la dose à partir de laquelle on observe 50 % de mortalité. "
Pour ce qui est du fipronil, les doses appliquées en laboratoire aux insectes sont du même ordre que celles rencontrées dans la nature, voire inférieures, selon Frédéric Delbac.
A de tels niveaux d'exposition, aucune des deux molécules testées n'est donc dangereuse pour l'insecte. Mais chacune entre en synergie avec les effets de Nosemaceranae : c'est ce " cocktail " qui est mortel.
Un tel constat est de mauvais augure pour l'hyménoptère. " Il est plus difficile, pour une espèce, de s'adapter à une pression qui résulte de la conjugaison de deux facteurs très différents que lorsqu'un unique facteur est en cause ", explique M. Delbac. Cet " effet cocktail " démontré en laboratoire n'est pas étonnant : les spécialistes le soupçonnaient de longue date, sans l'avoir quantifié.
Le fait singulier est plutôt que chacune des deux molécules - appartenant pourtant à deux familles chimiques très différentes - provoque des effets comparables lorsqu'elle est associée au parasite. Les auteurs n'ont pour l'heure pas d'explication à ce phénomène, qui pourrait conduire à un réexamen des autorisations des molécules phytosanitaires.
Stéphane Foucart
© Le Monde
Ne vous contentez pas de lire la version de Stéphane Foucart ou autres journalistes.
RépondreSupprimerIl ne dit pas nettement que ces insecticides seuls n'ont aucun effet sur les abeilles, alors que Nosema seul en détruit 50% !
Allez lire sur le site Imposteurs, par exemple, qui vous donne le lien vers le compte-rendu publié de cette étude et lisez les commentaires.
http://imposteurs.over-blog.com/article-parasites-insecticides-et-mortalite-des-abeilles-79348678.html