Il est temps de vous donner quelques nouvelles de
Sioule-Biogaz.
Depuis 1 mois l’installation fonctionne à peu près
normalement avec un débit honorable en progression grâce aux améliorations
apportées. Ces améliorations sont essentiellement sur la ration chargée dans
les digesteurs, sa composition, son mélange et l’aspersion.
Du fait d’un bon niveau de production, les garages sont
quasiment tout le temps en pression et l’air ne peut donc plus, ou moins
rentrer.
Nous avons eu de gros soucis avec l’aspersion et des
canalisations qui se bouchent par des dépôts solides mais non organiques, un
nettoyage des cuves a été nécessaire.
La méthanisation demande beaucoup de travail d’observation,
donc de patience et il ne faut surtout pas penser qu’une modification dans le
process se ressent tout de suite.
Cela demande aussi un temps considérable de surveillance
afin que le moindre critère de fonctionnement ne vienne perturber l’ensemble.
Mais depuis juillet dernier, date de l’ouverture à l’injection
du gaz dans le réseau, il s’est passé beaucoup de choses et surtout beaucoup de
problèmes.
En premier avec Air-Liquide dont les ingénieurs sont sans
doute très compétents en matière de recherche, mais c’est une machine immense
qui manque de réactivité et qui n’a pas assez de personnel sur le terrain. Une
demande de modification prend des semaines et nécessite l’accord d’une chaine
hiérarchique pléthorique. De plus les ingénieurs font peu confiance à l’exploitant
et veulent trouver des raisons à tous les problèmes et malheureusement il n’y
en a pas toujours, c’est l’œil de l’exploitant, comme celui d’un éleveur qui
détermine les problèmes et solutions sur place, ce qui n’est pas forcément
visible à 400km sur un ordinateur. Par contre les techniciens de terrains sont
très souvent débrouillards et consciencieux.
Le bras de fer a donc été dur jusqu’en février dernier où
le purificateur fonctionne avec beaucoup moins de problèmes, mais une somme de
petits problèmes auraient pu être résolus dans un temps très court si
Air-Liquide nous avait écouté davantage.
Ensuite nous avons eu des problèmes avec le poste d’injection
et là aussi pendant des semaines, des compteurs bloqués, des détendeurs
défectueux et le dosage du THT (l’odorisant) qui ne fonctionnait pas rendant le
gaz non-conforme et donc non valorisable. Les techniciens de GrDF ont été
toujours très réactifs, leur sous-traitant Elster un peu moins, mais lorsqu’on
ajoute les problèmes du purificateur et du poste d’injection parfois en même
temps, parfois en décalé, nous sommes restés parfois des semaines sans pouvoir
injecter.
Il faut saluer la patience du Crédit Agricole et de nos
actionnaires jusque là en matière de remboursement ou règlement des intérêts.
Il ne faut pas non plus passer sous silence notre
problématique d’étanchéité des garages qui a été accentuée par le fait de ne
pas pouvoir fonctionner. En effet les arrêts et démarrages successifs sur des
temps très courts de l’installation en aval du digesteur ne permettant pas un bon
fonctionnement du méthaniseur qui demande de la constance et de la régularité,
comme tout ce qui est biologique.
Cependant nous avons bien amélioré cette étanchéité par
la dépose d’un brevet pour compenser la dépression par l’injection de gaz dans
les digesteurs et sécuriser l’inertage
car chasser du méthane avec de l’air en fin de cycle est d’un danger rare et
réuni toutes les composantes de l’explosion.
Enfin nous sommes toujours effarés sur les normes
imposées en matière de qualité du gaz à injecter dans le réseau. Comme c’est
une habitude en France on demande à la méthanisation de produire du gaz dont la
qualité est supérieure à tout le gaz
fossile exploité et même pire, le gaz
vendu par les distributeurs est d’une qualité inférieure aux normes imposées
pour l’injection. Grâce aux analyseurs dont nous disposons nous avons pu
mesurer le gaz naturel acheté ayant un PCS bien inférieur à 10,70 et un taux de CH4 de 87%
alors qu’on nous impose un PCS supérieur à 10,70 et un taux de 96% de CH4 pour l’injection.
A noter que dans les autres pays européens aucune norme aussi drastique n’est
demandée aux exploitants. Comme tout ce qu’on fait en France on veut absolument
développer la méthanisation mais avec des boulets accrochés aux pieds des porteurs
de projet, on marche sur la tête !
Nous affirmons qu’il faut abaisser ces normes pour que la
méthanisation se développe enfin, surtout parce qu’en matière de biologie la
constance n’existe pas.
Et les contacts que nous avons avec les autres sites agricoles de méthanisation et d'injection nous relatent les mêmes problèmes avec un gradient plus ou moins important.
Le procès à l’encontre de COVEA-RISK, assureur de
Méthajade, pour l’explosion de la cuve en mars 2014 suit son cours et pour le
moment je n’en dis pas plus, mais lorsque les jugements seront rendus là aussi
j’ai beaucoup à dire sur les acteurs de cette procédure.
Nous envisageons de mettre en place un cluster de
recherche sur la méthanisation voie discontinue avec plusieurs partenaires, à
partir de notre unité de méthanisation afin de comprendre, d’analyser et d’améliorer
le principe de la méthanisation et de la valorisation du gaz à injecter. Ce
sera du concret et non comme tous ces groupes de travail ou think-thanks en
cols blancs, qui coûtent une fortune, théoriciens en puissance sans avoir
jamais passé plus de quelques heures à faire vivre un méthaniseur. Mais là
aussi c’est bien français, beaucoup d’argent pour des réunions autour des
petits fours qui déboucheront sur de grands principes qui ne pourront jamais s’appliquer.
Nous pensons maintenant à une inauguration officielle à
la fin du printemps et nous aurons l’occasion de nous exprimer plus largement à
cette occasion.